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Les peuples originaires en Colombie et dans le monde

  • Photo du rédacteur: Lola
    Lola
  • 17 mars 2019
  • 4 min de lecture

Dernière mise à jour : 19 mars 2019

Sur Terre depuis plusieurs milliers d’années, les peuples originaires sont aujourd’hui menacés par la globalisation culturelle et un développement économique croissant. A chaque fois qu’une langue ancestrale disparait, notre diversité culturelle diminue, et lorsqu’un territoire est exploité, c'est un lieu sacré qui s’efface.


Il n’existe pas de chiffre précis pour évaluer le nombre de personnes appartenant à un peuple indigène. On estime qu’elles seraient entre 300 et 400 millions, réparties dans 70 pays, sur les cinq continents. En Amérique Latine, 50 millions de personnes feraient partie d’une communauté originaire. Le siècle suivant la conquête de l’Amérique, 89% de la population indigène a été exterminée par les colons, lors de guerres, de massacres, par l’esclavage forcé, ou à cause de l’import de bactéries européennes auxquelles les systèmes immunitaires n’étaient pas familiarisés. Le bilan du génocide des peuples autochtones s’élèverait à 100 millions de victimes selon Russel Thornton (American Indian Holocaust and Survival, 1990).


Répartition mondiale des peuples originaires selon la FAO

La définition de « peuple originaire » inclue tous les peuples pré-étatiques, présents avant la colonisation de leur territoire, et s’étend des Américains natifs aux Maoris, en passant par les Inuits ou les Samis d’Europe du nord. Pour qu’un peuple originaire soit reconnu par l’ONU et défini comme tel, la notion de continuité historique d’’auto-identification sont essentielles. On en compte aujourd’hui plus de 5000. Ces peuples sont caractérisés par plusieurs adjectifs : « autochtone », « originaire », « natif », « indigène », ou encore « indien », alors que cette dernière appellation a une connotation très négative, car elle a été donnée par les colons qui pensaient avoir découvert l’Inde lors de la conquête de l’Amérique. Les peuples originaires n’avaient pas de nom défini avant 1492 :ils ont été catégorisés par les envahisseurs. En Colombie, on entend souvent la phrase « celui qui domine dénomme ». A titre d’exemple, le peuple pré-colombien Pijao, comptant encore 74 000 personnes, a reçu ce surnom des espagnols en référence au mot pija, caractérisant de manière vulgaire l’appareil sexuel masculin.


Les peuples originaires sont avant tout attachés à l’importante dimension du territoire, qui a pour eux une signification spirituelle et culturelle, et se place au cœur de la cosmovision. Ils vouent un culte très important à la Madre Tierra, la Terre Mère, qui dispose d’un nom dans chaque langue indigène, et qu’ils doivent protéger et préserver. La transmission du savoir et des traditions, et la conservation du langage comme forme de pensée ancestrale sont aussi au cœur de leur culture.


Représentation de la Madre Tierra

Alors que le nombre de personnes originaires en Bolivie ou au Guatemala atteint respectivement 71% et 66%, les peuples indigènes colombiens sont une minorité ethnique (environ 2% de la population). Selon l’Etat il y aurait 89 peuples, mais d’après l’Organismo Nacional Indígena de Colombia (ONIC), on pourrait en compter 102. En Colombie, plus de 60 langues sont encore parlées aujourd’hui. En Amazonie, on repère la présence de Huitotos et de Tikunas. Dans la région du Cauca, au centre des montagnes andines, on trouve les Mizaks et Yanacoas. A la pointe nord du continent, dans le désert de la Guajira, vous pouvez rencontrer les Wayuu, qui défendent très fortement leur identité. Entre mer des Caraïbes et montagnes, dans la Sierra Nevada près de Santa Marta, les Koguis exercent encore leurs traditions. Dans le Parc National Naturel de Tayrona, au cours d’une randonnée, on peut apercevoir des huttes traditionnelles dans lesquelles vivent des Tayronas, dans la forêt. Enfin, autour de la Bogota, la capitale, il y a une majorité de Muiscas, dont une grande partie est aujourd'hui urbaine. Cette liste est bien sûr non-exhaustive…


Femmes Wayuu dans la Guajira

Avec l’adoption de la Constitution de 1991, la Colombie est parmi les premiers pays d’Amérique latine à s’engager dans la reconnaissance officielle de la diversité, par la suite progressivement exprimée dans toute la région. Pourtant, les peuples originaires colombiens sont encore menacés. Ils affrontent une grande précarité économique, et la défense de leurs territoires contre le conflit armé ou l’exploitation leur vaut d’être assassinés. En 2008, 400 leaders ont été tués. 10 ans plus tard, en 2018, les chiffres sont encore alarmants : 172 activistes ont perdu la vie d’après une enquête de la Defensoria del Pueblo de Colombia, organisme gouvernemental chargé de superviser la protection des droits civils et fondamentaux.


Dès la Colonisation, le rapport entre les communautés et l’État a été très compliqué, car la création d’une Nation était synonyme d’une négation de l’hétérogénéité et de la diversité culturelle. La logique de construction de l’État était eurocentrée. Après avoir décimé de nombreux peuples, les colons ont implanté une voie d’intégration des peuples par l’assimilation, qui refusait toute place au pluralisme. Dans de nombreux pays la relation avec l’État est encore très fragile, comme en Argentine où le gouvernement n’est pas du tout inclusif, et vend les terres ancestrales des Mapuche à de grands groupes économiques comme Benetton. La feuille de Coca, sacrée pour beaucoup de peuples, et utilisée à des buts médicaux, alimentaires, et spirituels voit son usage interdit dans beaucoup de pays d’Amérique latine, ce qui constitue un obstacle à la pratique culturelle et à la souveraineté alimentaire des peuples originaires. Comme au Pérou et en Bolivie, la consommation de feuille de Coca est légale en Colombie, et pourtant les plantations sont fumigées dans la lutte du gouvernement contre la production de cocaïne, qui comprend pourtant moins d’1% de Coca dans sa composition. Cette lutte porte atteinte à la spiritualité des peuples originaires, dont l’identité, les droits civils, et la dignité sont constamment menacés aujourd’hui, dans le monde et en Amérique latine particulièrement. Au Brésil, Jair Bolsonaro, président récemment élu, affirme qu’à la fin de son mandat, plus aucune parcelle de l’Amazonie n’appartiendra aux peuples indigènes, qu’il considère comme un « sous-peuple », mais qui dédient pourtant leur vie à protéger le Poumon de la Terre.

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